Difficile de dire ce à quoi tu t’étais attendu en envoyant Masato choisir une quête pour vos prochaines aventures. Vivre comme des rois demandait un approvisionnement certain en jewels et cet approvisionnement demandait l’accomplissement de missions qui, la plupart du temps, s’avéraient être celles délaissées par la majorité des autres mages. Après tout, c’était bien là ce qui vous caractérisait vous, les indépendants. Ceux à qui l’on confiait le sale boulot, celui que les mages officiels avaient jugé comme étant trop dangereux ou trop ennuyeux, peu importe.
Quoiqu’il en soit, vous aviez tout de même de quoi vous en mettre plein les poches sans vous aventurer dans des contrées trop lointaines, ou dans des bourbiers trop évidents. Enfin ça, c’était lorsque la personne supposée choisir la quête se faisait un minimum sensée, ce qui n’était pas le cas de ton acolyte. Dieu de la guerre se surnommait-il, bien sûr, tu aurais dû être capable de voir venir l’arnaque, mais tu t’étais fait naïf, préférant croire en ton ami, que dis-je, en ton frère. Grave erreur. Son retour fut synonyme de désillusion, surtout lorsqu’il te présenta l’acte de mission sur lequel trônait votre objectif : la neutralisation d’un mage noir qui commençait à un peu trop faire parler de lui.
Paupières closes, tu laissas un soupire venir mourir contre tes lèvres, ramenant ta main contre de ton front et frottant ce dernier en mimant une migraine soudaine. "Eeeh, tu pouvais pas prendre un truc moins chiant ?" Parce que tu savais ce que tout ça signifiait. Vous alliez devoir traverser les zones désertiques de Fiore pour récolter des indices, traquer quelqu’un qui cherchait sans nul doute à effacer ses traces et une fois tout cela fait, vous alliez devoir mettre fin à son existence, car vous n’étiez pas du genre à gracieusement lui offrir la rédemption.
De l’eau, quelques vivres et de quoi vous repérez, c’était tout ce dont vous aviez besoin et tout ce que vous aviez choisi d’emmener avec vous. Deux indépendants, deux vagabonds qui erraient désormais dans le canyon de la Gorge des Vents. "Normalement devrait y avoir l’un des camps de clochards qu’ils ont massacrés pas loin." Enfin ça, t’en es pas trop sûr, faut dire que la carte que vous avez déniché est franchement douteuse, ressemblant plus au dessin d’un enfant qu’à l’œuvre d’un cartographe de la région. Encore des Jewels mal dépensés. "Sinon viens on attrape un monstre et on lui demande s’il a des infos."
Vous n’étiez peut-être pas capables de comprendre les créatures du désert, mais tous les êtres vivants de ce monde étaient doués d’un langage universel : celui de la bagarre. Tabasser un monstre et lui demander de pister vos proies, c’était faisable, non ?
Comme à son habitude, le maître des morts se mettait à geindre. Loin d’être désireux de décrypter une quelconque signification derrière ce comportement de fiote, le maître des vivants avait le regard plongé dans l’avenir. Un avenir radieux et désespérant. Un avenir fait de flammes et de déluge. Un avenir où combattront dieu(x) et calamité(s). Petit rictus à la pensée de se friter avec l’homme au dégradé plus qu’approximatif, son heure viendra. Comme celle de tous les autres. Alors, Masato ne cherchait pas plus que ça à justifier son choix, un dieu n’avait pas à le faire “Tu me remercieras quand des rois plieront l’échine à l’écoute seule de nos noms.” et le moyen le plus rapide était d’inspirer la crainte, être le prédateur parmi un troupeau de proies.
Une fois sur place, il y avait peu de choses à redire. Déjà, Rakuraï n’avait pas très bien suivi ce qui s’était dit lors de la réunion concernant le mage noir. Cela tombait bien, Masato non plus. Écouter des mortels ? Et puis quoi encore ? Leur demander des allocations ? Non, le plan était simple mais se montrerait diablement efficace : trouver la cible et la tuer. En fonction de la situation, un interrogatoire pourrait effectivement être de mise mais pour l’heure, il fallait se montrer productif. En jetant un coup d’oeil à la carte, la divinité tiqua “Donc là, c’est ça ta proposition ?” il observait les alentours et repéra rapidement un caravansérail (de prime abord) abandonné.
“Essayons d’abord de voir ce qu’on pourra trouver là-bas. Une meilleure carte, quelqu’un de vivant, des montures ou juste des informations sur la région.” c’était peut-être plus intelligent. Masato n’avait nullement envie de courir après un couard à travers dunes et désert. Une fois face au bâtiment, un détail était flagrant : ses murs étaient couverts de cercles et de mots impurs : écrits en langage obscur et avec du sang. Humain était-il ? Allez savoir. Il était d’ailleurs fort probable que les mots n’étaient qu’un gloubigoulba de charabia inventé par un fou “Sacrée ambiance, on peut dire que…” disait-il en dégainant doucement son arme “le sang de ce pauvre homme n’a fait qu’un tour.” c’était encore à travailler.
“Le lieu est plutôt imposant, séparons-nous Calamité.” laissant tout le loisir à Rakuraï de découvrir ce qui pouvait bien se trouver dans les appartements à occuper pour une nuité, Masato s’était dirigé vers les écuries. En vain, enfin si on voulait. Aucune monture dans le coin. Cependant, il restait des harnachements au sol. En observant leur qualité du bout de ses doigts, le dieu en distingua qu’il s’agissait de l’oeuvre d’un artisan ayant sans doute une certaine renom. C’était donc un objet de valeur mais il avait été laissé ici, en proie à de multiples dérobades ? Le mystère qui entourait ce lieu ne faisait qu’accroître au lieu de se dissiper. Si Dwayne était responsable d’un massacre dans le coin, l’argent tout comme les parures ne l'intéressaient guère. Un soupir s’échappa des lèvres de Masato “Quelle vie de merde il doit avoir quand même.” avant de partir rejoindre son acolyte.
Loin de l’avoir retrouvé, l’ambiance macabre des lieux et le silence qui en découlait portait à croire qu’un danger rôdait et que le duo n’était pas le bienvenu. Ou alors, il l’était. Il avait peut-être même espéré et que cet endroit ne s’avérait être finalement ni plus ni moins qu’un piège ? Entre paranoïa et tension imposée par la Gorge des Vens, l’épéiste serrait un peu plus son katana. Si quelqu’un allait voir sa vie défiler devant ses yeux aujourd’hui, ça ne serait certainement pas lui. Oh que non.
